29 - Mémoires du GONm ; interview du 50° anniversaire : Thierry Lefèvre
Posté : 22 sept. 2022, 12:01
A l’origine :
Né en 1964 à Villedieu-les-Poêles, j’ai passé mon enfance et mon adolescence à Saint-Sever-Calvados. Avec ma famille, nous habitions dans le bourg mais la forêt domaniale était toute proche. Aussi, les balades dans ce massif forestier ont été nombreuses quand ce n’étaient pas les parties de luges ou plutôt de sacs à engrais remplis de paille ou de foin, avec mon frère et les copains. Mais à cette époque, il était fréquent que l’hiver soit ici ponctué de quelques semaines de neige …
Enfant, j’attrapais les poussins de la ferme de mes grands-parents et ma grand-mère maternelle prenait soin de bien fermer la basse-cour à chaque fois que nous venions ! A cette période, je possédais une fronde et tirait sur les oiseaux et notamment sur les multiples moineaux. Un jour, il se trouve qu’un rouge-gorge a fini d’agoniser dans le creux de ma main. Et cela a été pour moi le déclic : « A travers son regard, j’ai eu l’impression que ce passereau me demandait pour quelle raison m’avez-vous ôté la vie ? ».
Et depuis, j’essaie de rattraper mes fautes en agissant en faveur de la protection de la nature…
Jeunesse :
Collégien jusqu’en cinquième à St-Sever, je poursuis mon enseignement au lycée-collège Pierre et Marie Curie de Vire. De retour le soir dans ma chambre et à mon bureau, je ne manquais pas de jeter un coup d’œil à la mangeoire idéalement placé dans le jardin : mésanges, pinsons des arbres et du Nord, moineaux et autres volatiles se chamaillaient les quelques graines. Toutes mes observations étaient déjà consignées dans un cahier.
Dans la bibliothèque, une encyclopédie sur la faune était en bonne place à côté des magazines traitant de l’actualité footballistique. Sensibilisé, dès l’âge de 19 ans, j’adhère au WWF France et m’abonne à sa revue trimestrielle « Panda ». Puis rapidement je m’intéresse essentiellement aux rapaces et devient en 1985 membre actif du Fonds d’Intervention pour les Rapaces. Je distribue alors sur les marchés des dépliants présentant les rapaces, leur utilité et le FIR. Je fabrique et pose mes premiers nichoirs à chouettes ; le premier, destiné à la chouette effraie, dans une grange le 14 septembre 1986. Peu de temps après, dans cette même grange, je surprenais ma première chouette chevêche en repos diurne sur une poutre ! Je vais jusqu’en Franche-Comté localiser et surveiller les nichées de busards avec le FIR section Monts-Jura/Alpes du Nord.
Premiers contacts avec le GONm :
Le baccalauréat en poche, je suis admis à l’Institut Universitaire de Technologie de Tours, département « Biologie Appliquée » - Option « Génie de l’Environnement ». Les études se terminaient par un stage de trois mois. Sur le mur où étaient affichées toutes les offres de stage, il y en avait plusieurs émanant du Groupe Ornithologique Normand. Le sujet qui a eu alors ma préférence était celui du Tadorne de Belon en Baie d’Orne. Je rencontre alors Gérard Debout et Bruno Lang qui me présentent le site, les objectifs du stage et le logement dans la Maison de la Nature de Sallenelles mis à disposition gratuitement par le Syndicat Mixte d’Aménagement de la Base Littorale de Nature et Loisirs de l’Estuaire de l’Orne. D’ailleurs, ce retour sur l’année 1986 a été l’occasion de me repencher dans mon rapport de stage qui avait été frappé à la machine à écrire (!) par Jocelyn Desmares et de constater qu’une bonne partie des mesures de protection préconisées dans ce document ont vu le jour.
Dans la foulée, je prends ma carte au GONm…puis le relais de François Leboulenger pour la rédaction des chroniques ornithologiques du groupe L « cuculidés-colombidés-strigidés-tytonidés ».
Située à deux pas de chez moi, je participe aux premiers travaux d’entretien de la Réserve ornithologique du Lac de la Dathée où je fais la connaissance de Jean Collette qui m’initiera à la reconnaissance des oiseaux à travers leurs chants.
Je me souviens bien de ces chantiers hivernaux entrecoupés d’un bon pot-au-feu pris dans une ambiance conviviale au restaurant de Saint-Manvieu-Bocage !
Les débuts de la réserve du Gast :
En 1987, j’assiste à la mise en eau de la retenue de la Sienne située entre la Forêt de Saint-Sever et les Bois du Gast, barrage-réservoir d’eau potable et de soutien d’étiage. Ce lac de 65 ha a été très vite colonisé par les oiseaux. En effet, la moitié des 81 espèces d’oiseaux d’eau recensées jusqu’à aujourd’hui a d’ailleurs été notée pour la première fois les deux premières années. Que de beaux souvenirs lorsque muni d’un petit télescope en guise de longue-vue, j’admire, malgré la pluie, ma première famille de grèbe castagneux – aux couleurs chatoyantes - se faufilant entre les souches des arbres abattus et que Jean avait réussi à faire conserver !
Au vu des capacités d’accueil pour l’avifaune sédentaire et migratrice, nous entamons avec Jean les démarches pour la création d’une réserve ornithologique sur ce site et notre association GONm est invitée aux réunions du Conseil d’administration de l’Entente Interdépartementale du Centre du Bocage Normand, propriétaire du barrage et de sa retenue attenante.
Les choses vont aller très vite. Au printemps 1988, les présidents des associations locales de pêche, Messieurs Matillon pour la Gaule sourdine et Laporte pour la Gaule séverine, acceptent la création d’une réserve ornithologique dont les limites font l’objet d’un accord entre les deux présidents et Jean Collette, alors administrateur du GONm : 1,3 km de rives de tranquillité dans la queue secondaire. La convention de gestion est signée entre le Président du Comité de Gestion Piscicole, Matillon et le Président du GONm, Gérard Debout, le 2 août 1988.
Nous aimerions que cela soit aussi rapide ailleurs …
Depuis, les relations ont toujours été très constructives que ce soit avec les Présidents de l’A.A.P.P.M.A. du Bassin de la Sienne qui ont succédé à M. MATILLON, MM. LE BLANC et DELAMARCHE, ou avec les Présidents successifs de l’Entente devenue Institution Interdépartementale du Bassin de la Sienne, MM. BOUGOURD, GOUJON, SESBOUE, LABARRIERE, GUILLOU, Mme NOUVEL … sans oublier le secrétaire de l’IIBS, M. VENRIES.
Les hivers froids m’ont permis de cocher tous les canards de surface et de plongée que nous pouvons observer en Normandie. Au printemps et en été, avec d’autres collègues du GONm, je suis la nidification. En 1990, lors de la réunion du 21 mars du Conseil départemental de la chasse et de la Faune sauvage, il avait été convenu que les réserves ornithologiques des Lacs de la Dathée et du Gast feraient l’objet d’un suivi soutenu de la nidification. Ce suivi avait été mené en parallèle entre des membres de la Fédération de Chasse du Calvados et des adhérents du GONm (Philippe Ollivier, Stéphane Lecocq et moi-même). Résultat commun : pour l’ensemble des nichées (43), 100% des nichées d’oiseaux classés gibier d’eau ne volaient qu’au 25 août !
Dans les années 1990, avec Stéphane Lecocq, nouveau conservateur de la Réserve ornithologique du Lac de la Dathée, nous avons régulièrement organisé des animations grand public à l’automne et en hiver, période la plus favorable pour l’observation des oiseaux sur les deux plans d’eau. Les sorties avaient en général lieu un dimanche matin par mois et le public était convié à 9 h en queue de la Dathée. Après une heure et demie d’observations et d’apprentissage de reconnaissance des oiseaux sur ce site, nous poursuivons la matinée sur le site du Gast. De ces animations, une anecdote est à relever : lors de l’hiver 1990/1991, plus précisément le 3 février, l’arrivée de notre groupe à la Dathée avait fait envoler deux mâles de harle bièvre que nous retrouvions deux heures plus tard sur le site du Gast. Ceci venait confirmer les échanges réguliers, que nous soupçonnions, entre les deux réserves, distantes seulement de 7 km à vol d’oiseau.
Observatoires, des constructions longues :
Au Gast, le chantier le plus important entrepris reste sans nul doute la construction de l’observatoire scientifique réservé aux membres qui effectuent les comptages.
L’implantation de cet observatoire ne pouvait se faire que sur un secteur proche du cœur de la réserve et devait permettre une observation aisée de la plus grande partie du lac. L’emplacement a été retenu en fonction de ces critères et en étroite collaboration avec M. Pellerin qui a bien voulu concéder au GONm une petite partie des terrains lui appartenant.
Après plus d’un an de démarches administratives pour obtenir le permis de construire, accordé au final par le Préfet de Région, le chantier ouvre officiellement le 5 novembre 1996. Douze bénévoles du GONm se relaieront le week-end et parfois en semaine, et pendant deux ans, pour construire ce poste d’observation de 14 m2 de surface et de 3,80 m de haut : Bruno CHEVALIER, Jacques COQUUNOT, Pascal CRUET, Sylvain HAMEL, Stéphane LECOCQ, Claude LEFEVRE, Stéphane LETESSIER, François et Odile MARCHALOT, Frédéric NOEL, Denis VALLEE et moi-même.
Hormis les gros poteaux en bois servant d’assises et les planches de bardage amenés par M. Jeanvoine, garde-particulier de M. Pellerin, à travers les bois et par engin motorisé jusqu’au site d’implantation, tous les autres matériaux ont été transportés à dos d’homme ou en brouette sur 240 m via un sentier très étroit ! Parmi tous les bénévoles, c’est certainement Claude LEFEVRE, mon père, qui a consacré le plus d’heures à cette réalisation. C’est même lui qui a trouvé le tailleur de pierre à qui nous avons fait appel pour diviser un gros bloc de granite situé au niveau de la fosse d’un des piliers …
Nouvelle anecdote à faire partager : un dimanche matin, par temps humide et de brouillard, nous arrivons sur le site alors que toutes les fosses avaient déjà été creusées à la main. La pluie des jours précédents avaient plus ou moins rempli les fonds et des amphibiens s’étaient alors trouvés piégés. Nous avons donc commencé la journée par libérer crapauds communs, grenouilles rousses et salamandres tachetées. Ce piégeage bien involontaire de notre part nous offrait un premier aperçu de la faune batrachologique du lieu. Depuis, quatre nouvelles espèces ont été identifiées.
Au début des années 2000, deux fenêtres d’observation ont complété cet équipement en rive gauche. Elles sont en permanence ouvertes au public et ont été installées sur les terrains de Monsieur Pellerin, propriétaire riverain qui a tant fait pour le développement et le rayonnement de la réserve.
Et au début des années 2010, l’IIBS installe, avec nos conseils, en rive droite et en limite de la forêt un observatoire destiné au public. Ce poste sera couplé d’un grand panneau d’information et ce dans le cadre du programme de valorisation écologique, pédagogique et éco-touristique du site du Barrage-Réservoir du Gast lancé par l’IIBS (Institution interdépartementale du bassin de la Sienne) en 2009.
Réserve du Montanglier – Saint-Martin-Don :
Dans le Bocage virois, une 3ème réserve ornaise a vu le jour en 1993, grâce à la bonne volonté de Jan et Anne-Marie Van Torhoudt. La convention de gestion a été signée entre ces propriétaires et le GONm le 6 octobre et concerne un ensemble de 11 hectares de bois et de prés, situés au lieu-dit Le Montanglier sur la commune historique de Saint-Martin-Don.
Cette réserve est riche en fauvettes, pouillots, roitelets, pics (4 espèces) mais aussi en amphibiens et reptiles : Alyte accoucheur, grenouilles rousse et verte, salamandre tachetée, tritons alpestre, crêté, marbré et palmé (soit 5 urodèles sur les 6 que l’on peut rencontrer en Normandie !), couleuvre à collier, lézard vivipare et vipère péliade.
Nous pouvons y croiser les principaux mammifères communs de Normandie : blaireau, chevreuil, écureuil roux, fouine, lièvre commun, renard roux, sanglier… D’ailleurs, le Groupe Mammalogique Normand (François Marchalot) y a posé 11 gîtes à chiroptères contre des troncs pour des espèces plutôt forestières : barbastelle d’Europe, murin de Bechstein et oreillard roux.
45 espèces d’oiseaux y ont déjà été observées, les cavernicoles ayant à disposition 11 nichoirs dont 4 pour les chouettes. De plus, les arbres secs sur pied ainsi que les vieux arbres tombés lors des tempêtes sont laissés sur place et font le bonheur des champignons et des insectes qui les recyclent en humus.
Ce site est enfin un lieu d’animations, notamment au moment du retour des migrateurs : une visite est organisée chaque printemps en collaboration avec l’Association Touristique des Vallées de la Vire et de la Souleuvre. Une boucle ornithologique jalonnée de pancartes directionnelles et de panneaux d’information y a d’ailleurs été aménagée.
Les nocturnes, ma passion :
Enfin, je ne pouvais pas terminer ce témoignage sans évoquer de façon plus détaillée ma grande passion pour les oiseaux de la nuit.
Tout d’abord un peu d’historique en rappelant ce qu’a été la « Centrale nocturne ». En 1986, Hugues Baudvin et ses collaborateurs de La Choue (association bourguignonne d’étude et de protection des rapaces nocturnes) lance cette idée. Cette centrale avait l’ambition de rassembler le maximum d’informations sur les personnes qui étudient, protègent ou possèdent des données fragmentaires sur les rapaces nocturnes en France. Elle voulait être un moyen d’échanger des expériences, des adresses et de multiples renseignements. Sans avoir créé une structure supplémentaire, ces fondateurs ont proposé un coordinateur par espèce pour faciliter le fonctionnement. Ce coordinateur synthétisait pour chaque espèce les informations recueillies à l’aide d’une fiche élaborée à cet effet et de restituer ces informations sous forme d’un bulletin annuel. L’idée est relayée par l’Union Nationale des Associations Ornithologiques (UNAO) et parvient ainsi jusqu’au GONm. Dans la foulée, le Conseil d’Administration me désigne en juin 1987 comme le Coordinateur Rapaces Nocturnes au sein de notre association : à charge pour moi d’envoyer à fin de chaque année les données pour notre région.
Le premier bulletin paraît en 1988 et rassemble les données de 1987. Cette synthèse a été rédigée par Hugues Bauvin pour la chouette hulotte, la chouette de Tengmalm, le grand-duc, le moyen-duc, le petit-duc et le hibou des marais, par Jean-Claude Génot pour la chouette chevêche, et par Yves Muller pour la chouette effraie.
La diffusion du rapport sur les actions de la Centrale Nocturne est reprise par le FIR en 1991 mais, cette centrale s’arrêtera de fonctionner en 1996 avec la dissolution du FIR devenu Mission Rapaces de la Ligue pour la Protection des Oiseaux.
Mais ce n’est pas pour autant que les activités d’étude et de protection des rapaces nocturnes au sein de notre association se sont interrompues, bien au contraire : étude et protection de la chouette hulotte en forêt domaniale de Saint-Sever-Calvados à partir de 1988 (avec la participation de Christel, mon épouse), étude et protection de la chouette chevêche dans le Domfrontais dès 1989, avec le Parc Naturel Régional Normandie-Maine, lancement en 1992 par le GONm et Jean-Michel Henry d’une opération de parrainage pour la pose de nichoirs à chevêche (pour 100 F versés, les donateurs reçoivent les résultats du suivi de leur nichoir pendant 3 ans et c’est ainsi que 350 nichoirs seront posés dans toute la Normandie), étude et protection de la chevêche sur le plateau du Neubourg et sous la houlette de Claude Ingouf, de la chevêche, de l’effraie et de la hulotte dans la Vallée de l’Avre par Jean-Claude Bertrand et son fils Frédéric, fabrication et expédition de nichoirs à effraie en kit dans toute la Normandie par Gilbert Homo à la fin des années 1990 et au début des années 2000, avec l’aide de mon fils Raphaël, programme Suivi Ponctuel des Oiseaux Locaux Effraie des clochers en Normandie de 2010 à 2019 (680 chouettes effraies baguées dont 656 jeunes et 24 adultes par James Jean-Baptiste, David Vigour et Alain Chartier) ...
Dans le Domfontais et le Mortainais, le programme avec le PNR n’a pas connu un grand succès. Sur les 60 nichoirs posés, seulement 2 ont été utilisés temporairement mais ont toutefois servi à la reproduction d’autres espèces cavernicoles : étourneau sansonnet, mésange charbonnière, rougequeue à front blanc, sittelle torchepot, pics…Je me souviens de la pose des premiers nichoirs que mon ami Michel Noel avait fabriqué et posé chez des propriétaires de vergers qu’il a fallu convaincre au préalable ; des prospections nocturnes, toujours avec Michel ; des journées à obturer, à l’aide d’une perche télescopique, les sommets des poteaux téléphoniques métalliques et qui avaient été parfois recyclés en piquets de clôture augmentant d’autant le travail (Sylvain, le fils de Michel, était parfois de la partie…en poussette). Près de 1 000 de ces pièges mortels ont ainsi pu être neutralisés sur ce secteur et plus de 50 000 dans toute la Normandie, rien que par les bénévoles de notre association !
La chevêche :
Le dénombrement des mâles chanteurs au printemps, sur 5 100 hectares, a permis de suivre la régression de la petite chouette aux yeux d’or au fur et à mesure que le système fourrager basé sur le maïs-ensilage progressait : 15 mâles en 1989, 9 en 1992, 3 en 1997, 0 en 2000, soit une perte annuelle d’environ 13% de l’effectif compté en 1989, et la disparition de l’espèce en une décennie...
Mais l’espoir est permis pour ce petit rapace nocturne d’origine méditerranéenne qui semble revenir un peu partout, peut-être à la faveur des modifications climatiques…et nous pouvons de nouveau admirer cet oiseau dans le Domfrontais comme lors de la sortie nocturne grand public organisée le 18 juin 1994 au cours de laquelle la petite chouette, répondant à la repasse, vint se percher sur un piquet de clôture à quelques pas devant nous, faisant la joie des personnes présentes.
Les clochers en Seine-Maritime :
A noter que ces activités se sont aussi récemment essaimées jusqu’en Seine-Maritime, département peu pourvu en nichoirs et peu concerné par les actions de protection des nocturnes (seulement une lettre circulaire adressée en 1987 par le GONm à tous les maires de ce département pour éviter l’engrillagement des clochers). Ainsi, début 2016, François-Xavier Plaisant me contacte et se propose de prendre part au Programme d’Etude et de Protection de l’Effraie des Clochers en l’étendant au Petit Caux, territoire touchant le département de la Somme.
Cela faisait déjà quelques années que notre collègue, passionné par ce rapace nocturne, prospectait, prenait des contacts avec des mairies, des particuliers…mais peu de réalisations concrètes. Aussi une nouvelle affiche intitulée « A la recherche de l’Effraie », avec cette fois le logo de notre association, est réalisée. Un courrier à l’entête du GONm, accompagné d’un questionnaire, est adressé à plusieurs communes. Résultat : quelques municipalités se montrent intéressées. Dès lors, le processus peut être enclenché : la première demande officielle d’autorisation de la pose d’un nichoir part le 3 septembre 2016, elle sera suivie d’autres jusqu’au printemps 2017.
Il faudra ensuite attendre les réunions des conseils municipaux, leurs délibérations et la réception des autorisations qui s’échelonnera jusqu’à la fin de l’été 2017.
Durant l’hiver 2017/2018, je consacrai quelques journées à confectionner 10 nichoirs et au printemps 2018, précisément durant le week-end de Pâques, je pris la route en direction du Pays de Caux avec une remorque chargée des nichoirs et deux échelles solidement attachées sur les barres de toit de la voiture. Après un parcours de 260 km, j’arrive au premier point de rendez-vous fixé au pied d’une église, et les poses s’enchaîneront jusqu’au dimanche après-midi avec l’aide du beau-fils de François-Xavier, Estéban, et de deux autres membres, Frédéric Garcia et Vincent Poirier.
Encadrée par François-Xavier, une petite équipe a ainsi pu se constituer localement, rejoint depuis par Michel Goffettre qui est devenu le spécialiste de la fabrication des nichoirs. Plus de 60 nichoirs supplémentaires et des piquets d’affût ont été posés et destinés également à la chouette chevêche et au faucon crécerelle, en partenariat avec des communautés d’agglomération ou de communes, des communes, des syndicats de bassin versant, des exploitants agricoles, des agriculteurs biologiques, des particuliers…3 nichoirs virent l’envol de 15 jeunes chouettes effraies dès l’année suivante, en 2019, et depuis le taux d’occupation progresse.
Je ne manquerai pas de revenir un jour pour constater sur le terrain les actions et les efforts entrepris par cette équipe pour la sauvegarde des rapaces.
L’activité de « chouettologue » est exigeante en temps, en déplacements, en finances (même si la petite quincaillerie et une partie du bois sont pris en charge par notre association) mais aussi très contraignante et physique voire dangereuse : démarches auprès des propriétaires de sites potentiels, fabrication des abris artificiels, visites de contrôle en soirée et de nuit, portage des échelles, installation au bout d’une échelle et parfois entre 6 et 7 m de hauteur (pour le chat-huant !), accès via les vieux et étroits escaliers des clochers, nettoyage de l’intérieur des boîtes, entretien des nichoirs et de leurs fixations, neutralisation des pièges comme les poteaux PTT ou les auges galvanisées ou en plastique, participation à la plantation de haies anticollision ou d’arbres fruitiers hautes tiges, étêtage de saules ou d’autres essences…
Mais quel bonheur de tomber sur quatre boules de duvet lorsque vous ouvrez la trappe de visite !